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La vengeance du reptile

  • Photo du rédacteur: Sandrine Cartier
    Sandrine Cartier
  • 2 avr.
  • 2 min de lecture

Lorsqu'il est amour, le feu dégage sa chaleur, sa lueur constante, fidèle, vivante. Comme "Un lien intime", il alimente nos cellules. Il incarne aussi la joie, une étincelle. Triste, il se fait cendre et ne sera plus que "Un souvenir". Ironique, dans "Ardente amourette", il joue avec les mots. Ici, la colère l'emporte. C'est un brasier incontrôlable. Jouons avec le feu! Jouons-nous de nos émotions...

Dragon libéré, scène de ménage pop
Dragon libéré, scène de ménage pop

C’est un soir où le feu couve.

Une soirée lancinante, une soirée où l’étincelle court et remonte centimètre après centimètre la mèche de dynamite…

Dans chacun de tes mots, de tes regards obliques, je sens l’arnaque. L’envie de te punir me consume les entrailles. Je me sens fougueuse, emportée et dure, impitoyable. Je ne te supporte plus et tu vas me le payer. Tes maladresses n’en sont pas, tout est calculé, tu sais pertinemment comment me faire exploser. Les circonstances importent peu, l’enjeu est clair: c’est la guerre et tu vas goûter de ma puissance de feu.

Je vais t’exterminer.


Intérieurement, j’ai l’impression d’être une possédée qui rit à gorge déployée, en craquant des allumettes. Je vois rouge. J’alimente le foyer de ma colère à l’aide de ce sang que tu verses dans mon verre, pensant m’endormir. Comme tu te trompes! Et ton erreur est jouissive. Paupières mi-closes, je m’amuse de ton manège cousu de fil blanc. Pauvre pantin. Je vais t’échauffer les sangs, tu vas voir.

Silence.

Puis, l’air de rien, tu lâches une petite phrase anodine, une information chargée de soufre. Qu’as-tu imaginé? Qu’elle m’anéantirait sans doute...


Mais elle met le feu aux poudres et tout s’embrase. Et cela, tu ne l’avais pas prévu. Tu n’avais pas vu que sous mes placides écailles déjà je brûlais et que je n’attendais que cette fuite de gaz nauséabond sifflant entre tes lèvres pincées pour exploser enfin. Ah le joli prétexte!

Je lance, rageuse et fulminante, le verre que je tiens entre les doigts sur le mur fraichement repeint de ta cuisine. Des flammes pourpres lèchent le blanc bien propre de tes efforts et ta main se teinte de la même couleur en ramassant les bris de verre sur le carrelage. Dans ton regard, je me reflète, je discerne dans tes pupilles la couronne de flammes sur ma tête. Je ris de ta peur, tu te recroquevilles comme un chiffon de papier qui se consume.


Je tourne les talons, dragon dédaigneux, te laissant couiner que tu t’es coupé, consoler tes enfants qui t’appellent dans le couloir, panser ta main, mettre de l’ordre dans ton chantier. Je ne me retournerai pas. J’ai vu ton vrai visage, cela m’a suffit.

C’est cramé.


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